ÊTRE ENSEIGNANT
Ceci n’est qu’une esquisse d’un brûlant et instantané désir de dire. Complétez s’il vous plait.
L’enseignant est avant tout présent à l’école pour transmettre le savoir aux élèves et permettre l’acquisition de savoirs. Mais comment réussir cette transmission ? Tout processus d’apprentissage est un acte d’amour. L’enseignant doit réussir à créer cette atmosphère idéale à toute communication réussie. Chaque enseignant est donc une personne affectueuse qui crée une certaine complicité préalable entre ses élèves et lui.
C’est également une personne dotée d’une force de caractère exceptionnelle.
En effet, le travail de l’enseignant l’oblige à travailler en présentiel. Un enseignant est la personne la plus scrutée au monde. Debout dans sa classe, il est l’objet de foire le plus dévisagé au monde. Lui tout seul au milieu de cent paires d’yeux telle la fleur convoitée par des abeilles, il instruit. Il est scruté, analysé, fouillé de fond en comble par des yeux curieux et inquisiteurs. Jaugé, intimidé, embêté, malmené, l’enseignant assure. Il endure ces dizaines de paires d’yeux toute la journée, toute l’année. Une kyrielle d’enfants venus de tous les horizons le fusillent de leurs yeux chargés d’émotion diverses où on peut lire en même temps : la curiosité, l’incompréhension, l’anxiété, le désespoir, la peur, la joie, la fierté, la colère, l’ennui, l’amour…
Chez nous au Bénin environ 60 enfants pleins d’énergie attendent un enseignant dans sa classe surchauffée. Il a à gérer 60 émotions diverses, 60 attentes permanentes, 60 cœurs à satisfaire et 60 cœurs à aimer, 60 et parfois plus d’élèves à respecter.
L’enseignant déploie énormément d’énergie pour orienter, calmer, inculquer le savoir à des êtres animés, turbulents et majoritairement pubères. Pour réussir son cours, ces êtres surexcités, il faut les discipliner, captiver leur attention, régler les différends, les motive. Il doit demeurer tout aussi attentif à tout ce qui se passe autour de lui dans la classe. Ainsi, il écoute ici, console là-bas, gronde plus loin, sourit là, encourage au fond, rappelle à l’ordre devant, gère tout le temps. Il est ici et partout à la fois, l’esprit en alerte constamment. Gérant des individualités il est obligé d’être une personne fûtée, habile et conciliante. Il comprend les uns et les autres et les amène à vivre en communauté dans la discipline et la cohésion.
Et ces yeux qui le poursuivent et le guettent lui imposent une rigoureuse discipline. Ces yeux lui intiment une certaine retenue. Si un employé peut s’esclaffer dans son bureau au souvenir d’un évènement drôle, ce plaisir est interdit à l’enseignant qui doit servir d’exemple à ses apprenants. Des agents pour se relaxer peuvent se déchausser, dénouer leur cravate ou déboutonner leur chemise et circuler en bras de chemise ou en sandale dans leur bureau pendant qu’il travaille. Les ennuis personnels de l’enseignant doivent s’évanouir pour laisser place à la retenue. Je pense aux jours de douleur où pleurer à chaudes larmes auraient été un si grand soulagement ! Un enseignant malheureusement ne peut se permettre une telle légèreté sans être désavoué aussi bien par les apprenants que par les responsables administratifs de son école. Il est tenu par un respect rigoureux des normes. Il incarne l’exemple.
Un enseignant est également une personne impartiale à qui incombe la réussite des enfants placés sous sa responsabilité. Il sait que de son travail dépend l’avenir de ces élèves ainsi que de la société. Il n’a pas de partie pris et travaille au rayonnement de sa classe. Il façonne avec entrain ces âmes généreusement confiés à son intelligence. Il les modèle avec patience et entêtement. Il bute, recommence, dénoue et noue, malaxe et recommence jusqu’à obtenir un résultat à la hauteur de ses espérances. Aucun sacrifice n’est de trop.
Ce travail est si éprouvant que l’enseignant finit sa journée complètement éreinté. A force de dire et de répéter, d’expliquer et de démontrer, il retourne chez lui _ la tête en feu, la gorge endolorie _ où l’attendent enfants et conjoints avides d’attention et d’affection. Cependant son travail n’est pas pour autant fini. Au milieu des siens, de ces sollicitations légitimes, le souvenir prégnant de ses apprenants l’habite. Il pense à la petite Mahougnon si morne ce matin, à un autre absent, à Ahlam qui semble remonter la pente… Une autre besogne non moins ardue l’attend aussi chez lui. Il doit continuer à travailler pour la relève de qualité. A la maison, il doit revoir ses fiches, corriger les cahiers ou les copies, rechercher des exercices, des textes, des anecdotes pour égayer ses apprenants, des textes drôles pour les maintenir éveillés et attentifs, des devoirs… l’enseignant est à l’œuvre en permanence.
Les enseignants sont des êtres d’exception.
Fémicriture,
Passionnément instruire !
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